Les 5 Commandements du Dentiste Français au Québec.

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Cet article décrit nos ressentis ici, notre vision de la profession de médecin dentiste ici au Québec (oui car ici les études sont appelées études de médecine dentaire). Ainsi des confrères pourraient avoir une vision totalement différentes en fonction des expériences vécues (ici ou là bas)

Tout d’abord en préambule, il faut avoir en tête que nous sommes deux cultures différentes, avec des formations différentes, une politique de remboursement social différente. Nous parlons la même langue mais les Québecois sont des américains qui parlent français et non des Français qui vivent en Amérique. La règle du « politiquement-correct » est donc de rigueur.

Il n’existe pas de fossé que ce soit au niveau technique ou au niveau matériel. Il existe de très beaux cabinets, des très bien gérés et des vieux avec du matériel des années 80 ou du « cheap » avec du matériel provenant quasiment de Ebay… un peu comme en France. Cependant la plus grosse différence matériel qui saute au yeux est que le fauteuil est rarement la priorité du cabinet, ainsi la majorité des postes pour les collabs (dentiste à pourcentage) seront dotés d’un magnifique fauteuil qui dépasse presque nos âges. Même certains dentistes propriétaires ont de beaux fauteuils du siècle dernier.

Ainsi pour nous il existe cinq grandes règles à suivre pour se lancer au mieux dans l’aventure nord-américaine et personne ne t’attend, tu devras faire tes preuves pour obtenir ton nom : les DU, les formations, les beaux diplômes français ici ne valent pas grand chose.
Tes grandes années d’expériences, la belle gestion de ta clinique, cela ne te donnera pas de passe droit pour sauter les échelons de ton ascension sociale ici. Tu commenceras comme tout le monde en bas et tu monteras plus ou moins vite en fonction de cette expérience acquise durant ces dernières années. Donc même si tu repars de zéro, tu auras toujours la possibilité de monter aussi haut que tu le souhaiteras avec le temps.

1/ Le patient est roi mais toi tu restes le patron.

Le patient qui veut imposer son plan de traitement, il va falloir s’y faire. Il paye donc  il a le droit de choisir. Très différent de la mentalité française qui laisse libre choix au dentiste de décider (si le patient n’est pas d’accord, il peut aller voir ailleurs), ici l’approche reste très différente. Il sera très mal vu de dire au patient d’aller se faire voir chez les Grecs si il est pas content. Il faut donc savoir user de beaucoup de diplomatie et d’explications pour essayer de faire choisir la meilleure solution pour le patient à nos yeux.
Ici le patient (ou son assurance) paye donc le prix d’une endo à 1000$ ou l’extraction à 114$ feront une différence pour le choix du plan de traitement. Il faut donc laisser le choix au patient avec un consentement total et éclairé sur les différentes solutions et le prix qui en découlera.

Cependant tu restes le dentiste qui a une valeur sociale très élevée. Le patient n’osera en règle général donc jamais te contredire, te poser des questions directement (ils passeront par l’assistante ou l’hygiéniste) ou bien te demander de reexpliquer. Tu devras ainsi lire le langage corporel et t’assurer de la validation du patient pour un plan de traitement si une minuscule réticence apparait.
De plus un patient insatisfait ne te le dira presque jamais directement, il te dira au revoir avec une grand sourire et ne se gênera pas de te faire part de son mécontentement aux secrétaires, à la boite à avis ou bien via les avis google sans jamais faire de vagues.

Ton plus grand allié pour éviter cela est ton équipe : l’assistance, la secrétaire, l’hygiéniste sauront  te guider et poser les questions si le patient ne semble  pas ravi à 100%.

2/ Ne fais pas le cowboys, ici tu ne tentes pas sans être sûr(e)!

À moins d’être sûr à 95% de la réussite de ton traitement, tu n’essaies pas de le faire à moins d’avoir prévenu le patient du risque d’échec. Ainsi les traitements endo non complets, la chir un peu acrobatique, le composite sans paroi rétentive, ça se fait mais il faut avoir proposé au patient avant de voir un spécialiste, donné des prix pour les autres solutions et fait signer un consentement comme quoi la situation présente un gros risque d’échec.

Si tu t’engages dans un traitement qui se met à tourner au vinaigre, tu temporises, tu proposes d’envoyer au spécialiste et tu fais signer un consentement au patient si il désire tout de même de finir le traitement sans garanti de résultat.

La clef ici est de connaitre ses limites et de toujours proposer de voir le spécialistes (il existent ici des spécialistes pour toutes les disciplines dentaires). Si le patient souhaite tenter quand même avec toi (coiffage direct en cas d’effraction pulpaire, instrument cassé lors d’une endo, CBS lors d’une chir), il devra signer un consentement. Les modèles sont disponibles dans toutes les cliniques et il est bien stipulé que le patient a eu le choix de son traitement et aussi le choix de voir un spécialiste pour son traitement.

Avec cela, tu te pares pour le troisième commandement.

3/ L’Ordre n’est pas ton ami , il ne t’aidera pas en cas d’erreur, bien au contraire.

Contrairement à la France qui a un Ordre très paternaliste et qui favorise la conciliation lors d’une procédure praticien/patient, ici l’Ordre est un vrai protecteur de la population. Son rôle est de se mettre du côté du patient pour vérifier que le dentiste est un bon dentiste et qu’il ne fait pas prendre de risque au patient de manière inconsidérée. Ainsi les radios/photos intraorales sont quasiment obligatoires en préopératoire pour pouvoir se justifier dans la mise en place d’un plan de traitement. L’Ordre peut les demander pour vérifier la prise de risque du dentiste. Il faut savoir qu’en cas de litige, c’est un jury de spécialistes de la discipline qui jugera le travail du dentiste. Ainsi autant dire qu’on ne se lancera pas dans le traitement hyper risqué que seul un spé peut faire car après si il y a un souci va falloir se justifier devant des spécialistes.

Le consentement signé reste la clef de voute pour pouvoir prouver que le patient était conscient et coopératif à la prise de décision du plan de traitement.

4/ Take your time.

Tu n’impressionneras pas réellement les autres ici  en faisant ton composite 3 faces en 20 minutes. Ici la qualité est le critère numéro un et les dentistes propriétaires sont très indulgents sur les dentistes finissant « lents ». C’est sûr que si tu travailles bien et vite, ce sera un gros atout, mais sache que ce n’est pas l’objectif ultime.

Ici tu es payé et tu peux vivre quel que soit le type de travail effectué. De nombreux dentistes ne prennent pas trop de risque en ne vivant que de composites et d’examens d’hygiène. Les tarifs te permettent de pouvoir mettre la digue dans tous les cas (libre à toi ensuite de la mettre ou pas) et d’axer ton travail sur l’art dentaire et non l’abattage industriel que la CPAM impose.

De plus forcément si un acte n’est pas parfait, le patient n’attendra pas le contrôle de l’année prochaine pour revenir et ne se gênera pas pour te demander ton explication sur la durée de vie réduite de ton travail (et si les explications ne lui conviennent pas, pour ensuite te faire un gros sourire et te bâcher auprès des secrétaires ou sur internet, cf commandement 1 )

De toute façon tu vas ralentir le rythme par toi même et apprendre à gérer 3 voir 4 patients en même temps. C’est l’une des raisons aussi pour laquelle tu prends ton temps car c’est très demandant de « switcher » d’un patient à l’autre car tes hygiénistes ont des patients et tu as les tiens. Donc il faut savoir faire la gymnastique entre les salles de soins pour te souvenir ce que tu dois faire, ce que tu as dit et ce que la patient attend de toi.
Les patients ici ne sont pas regardant sur la montre et peuvent attendre 10 minutes assis sur le fauteuil que tu finisses avec un patient avant que tu viennes continuer le soin. Le but de cette organisation est que tu ne fasses que tu travailles de « dentistes » et que tu n’attendes pas qu’un patient soit rentré dans la salle de soin pour reprendre la journée.

5/ REMPLIS TES DOSSIERS CORRECTEMENT.

Que ce soit dossier papier ou informatique, les dossiers ne sont pas modifiables après  les avoir remplis. Aucunes ratures ou ajout avec un astérisque ne sera toléré par l’Ordre en cas de litige.
Tu prends donc du temps pour les remplir, tu le fais correctement, tu y consignes tout (consentements du patient, mises à jour du dossier médicales, les radios, les facturations) tu les signes et tu les classes.

Ce point te permettra de conclure les 4 premiers points des commandements, tu mets la quantité et le type de produit utilisé/injecté, tu poses les diagnostics, les tests, les analyses radio, les références éventuelles, tout doit être justifié et ensuite le protocole complet doit être décrit, jusqu’aux conseils post-op du rendez vous (que ce soit de la chir ou un composite)  et le pronostic du travail fait.

Des contrôles réguliers de l’Ordre permettent de mettre l’accent sur les points faibles de ta façon de remplir les dossiers afin de tendre vers la perfection.

Maintenant petits conseils pour ceux qui cherche un stage :

  • Mets ton CV au goût du jour à la québécoise : pas de photo, pas de situation familiale, pas d’âge, priorité sur l’expérience professionnelle plus que les formations/diplômes. De nombreux sites internet sont dédiés à la rédaction des CV et des lettres de motivation à la québécoise, allez faire des petites recherches.
  • Recherche des annonces de ventes, de collab, etc sur les sites québécois tels que l‘Ordre ou l’ACDQ et tu tartines !!
  • Fais des suivis téléphoniques de tes CVs. Ici le téléphone est privilégié. Les mails sont laissés de côté et oubliés, le top c’est d’appeler et de demander à parler directement au gestionnaire. Ça permet de forcer un peu le contact.
  • Montre ta ganache ! Prends un billet d’avion et ose ! Plus qu’un CV, ici ils engageront une personnalité. Rien de meilleur que de montrer sa motivation et son joli minois pour jouer à l’Opération séduction. Des dernières personnes qui ont eu l’opportunité d’avoir une offre d’embauche, je pense que la majorité est venue déposer  le CV directement à la main du gestionnaire ou du dentiste. Ici ça marche énormément avec le réseautage, si tu n’en as pas et bien tu te montres !
  • Les villes Montréal et de Québec seront à éviter car les trois seules facultés du Québec y résident, la concurrence avec les diplômé québécois y est donc très rude.
    Et il est sûr qu’entre un dossier d’un canadien ou un dossier d’un stagiaire français pour lequel il faut faire des démarches compliqués d’immigration, il n’y a pas photos !
  • L’ADC propose quelques pages pour les dentistes étranger. Allez y poser un oeil.
  • Pour les spécialistes, comme je ne connais pas les démarches (est-ce les mêmes ou bien sont-elles différentes ?) Je vous invite à aller voir directement avec eux sur le site http://www.fdsq.qc.ca/fr/accueil.htm, peut être existe-t-il une démarche qui permet de court circuiter le stage ou BNED… qui sait ?

En espérant ne pas avoir dit trop de conneries et avoir pu aider un maximum d’entre vous.

R.

Repose en paix, système de santé français

 

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Aujourd’hui nous te pleurons pauvre France. Enlisée dans tes acquis, impossible à réformer tant les changements proposés tirent vers le bas ton mode de fonctionnement. Basé sur des textes d’après-guerre, milles feuilles d’ordonnances et de modifications, la Sécurité Sociale n’a guère plus l’éclat de ses belles années.

La Cinquième République arrive à bout de souffle et les « Dirigeants » ne le savent que trop bien. Il ne leur reste plus qu’à diviser pour essayer de faire prolonger ce Chant du Cygne qui n’a que trop duré. Les Cheminots avec leur acquis sociaux, les Enseignants et leurs feignantises, les Dentistes qui vont à leur cour de golf à bord de leur Porsche.

La France se meurt, mais les Français n’en sont pas à leur première Révolution. Espérons que les fakes news et les télé-réalités n’auront pas atrophié le reste de cellules grises qui sommeillent en chacun de nous.

Les articles ci dessous relatent très bien la situation que subit actuellement la profession que j’affecte tant. « Le plus beau métier du monde » vous dirai-je… mais aujourd’hui à condition de le pratiquer hors de l’Hexagone.

https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/cercle-181464-tarifs-des-dentistes-le-remake-du-scenario-2012-des-medecins-est-en-marche-2167992.php

http://laguttaperchee.over-blog.com/2018/02/systeme-de-sante-le-pire-est-a-venir.html

Pour information voici les prix pratiqués en 2016 dans la Belle Province (comptez 2 à 5% d’augmentation par an) comparés au reste du Canada . À savoir que ces honoraires sont totalement libres, donc bon nombre de clinique voit à la hausse ces tarifs…

http://plus.lapresse.ca/screens/b62d9376-daaf-4959-a1b8-ddf97f0010f1__7C___0.html

Alors il est cher le Dentiste en France ?
No comment…

R.

Médecin de Famille

C’est pas un réflexe pour nous d’essayer de trouver un médecin de famille : maman étant médecin généraliste, la consultation médicale en cas de petites maladies se faisait entre 2 portes à la maison. Depuis nous avons gardé l’habitude d’ausculter nous même les enfants et de demander conseil à maman pour savoir quoi prescrire.

Ici le fonctionnement de fainéants que nous avions ne pourra pas être mis en oeuvre pour la simple raison que contrairement en France le dentiste ne peut pas tout prescrire pour soi-même (enfin presque tout bien entendu). Et les ordres traquent la moindre prescription de complaisance.

Donc il faut absolument trouver un médecin de famille si nous ne voulons pas passer par la case « urgences » avec ses 17 heures d’attente en moyenne (et ce n’est même pas une exagérations de ma part) au moindre bobo ou petit problème de santé.

Ainsi dès que la carte soleil est éditée et reçue, il faut foncer (et non pas attendre 4 mois comme je l’ai fait) sur le site http://sante.gouv.qc.ca/programmes-et-mesures-daide/inscription-aupres-d-un-medecin-de-famille/

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Ici vous vous inscrivez et vous dites si vous avez besoin d’un médecin rapidement ou non (maladie chronique ou non). Tout va bien jusqu’ici, donc non, le temps c’est bon…

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Et là… roulement de tambour… le délai sort 🙂

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…presque 2 ans d’attente ! hahaha, pourvu que je ne tombe pas malade entre temps :p

R.